Lettre de liaison N° 280 - 21 septembre 2018 [Version pdf]
Conseil national de la FSU – 18 et 19 septembre 2018
Loi de sélection à l’université, contre-réforme du bac et du lycée, liquidation du statut des cheminots, le gouvernement Macron-Philippe a pu faire aboutir ses terribles attaques grâce à la concertation avec les responsables syndicaux.
Le courant Front Unique est intervenu pour que la direction de la FSU :
- se prononce pour le maintien du droit des bacheliers à s’inscrire dans la filière et l’université de leur choix, et qu’elle exige l’abrogation de la loi ORE et de la réforme du lycée et du bac
- se prononce pour la défense inconditionnelle du statut de la fonction publique, de la Sécurité sociale, des régimes de retraite et du code des pensions des fonctionnaires
- exige le retrait des projets gouvernementaux de contre-réformes des retraites et de la fonction publique
- rompe les concertations avec le gouvernement sur ses projets destructeurs
- s’adresse aux responsables des autres organisations syndicales pour qu’ils adoptent la même position
- œuvre à la constitution d’un front uni des organisations syndicales pour affronter le gouvernement et le mettre en échec.
Intervention du courant Front Unique dans le débat général (18 septembre)
Après une année de coups terribles contre les travailleurs, les jeunes, les retraités, les migrants, le gouvernement Macron-Philippe veut aller encore plus loin avec ses attaques programmées contre l’assurance chômage, la Sécurité sociale, les retraites et la fonction publique.
Mais qu’est-ce qui donne à Macron une telle détermination en dépit du rejet croissant qu’il suscite ?
Sans doute est-il persuadé que les conditions dont il a bénéficié depuis son élection vont perdurer. Et en particulier que les responsables syndicaux maintiendront coûte que coûte la concertation et le dialogue social sur chacun de ses projets destructeurs. Bref qu’ils se refuseront à engager tout réel combat contre lui.
Quelques mots sur la terrible défaite des cheminots qui nous concerne tous.
Il faut insister : c’est délibérément que l’intersyndicale dirigée par la CGT a refusé de mettre en avant la défense inconditionnelle du statut des cheminots. En acceptant de discuter de la convention collective qui devait se substituer au statut, l’intersyndicale a donné au gouvernement son aval à sa liquidation. Et si les cheminots ont manifesté une combativité exceptionnelle, ils ne sont pas parvenus à bousculer le dispositif de bouzille forgé par l’intersyndicale.
Pour la loi ORE de sélection à l’Université, le gouvernement a pu compter sur les représentants syndicaux qui ont participé à toutes les séances de concertation. Ce faisant, ils ont permis au gouvernement de faire voter sa loi sans encombre. Les mobilisations désordonnées qui ont eu lieu par la suite n’ont hélas pas réussi à inverser le cours des choses. Et pour la réforme du bac et du lycée, complément de la loi ORE, le processus de concertation a été identique aboutissant au même résultat.
Ainsi à chaque moment, le gouvernement a bénéficié de la présence systématique de tous les dirigeants syndicaux lors des concertations sur ses projets réactionnaires. Et le 17 juillet à l’Elysée, tous les responsables des confédérations syndicales s’empressaient autour de Macron qui avait remporté victoire sur victoire contre les travailleurs et les jeunes.
La loi ORE s’applique et Parcoursup est pour le gouvernement une entière réussite. Ce dispositif est en effet parvenu à empêcher des dizaines de milliers de bacheliers de poursuivre leurs études à l’université.
Confrontés aux refus purs et simples, aux « oui si » ou à l’absence de réponses, ce sont particulièrement les lycéens issus de LEP, de lycées techniques ou résidant dans certains territoires qui ont été rejetés ou découragés. La réforme du bac et du lycée poursuit les mêmes objectifs : restreindre le champ des possibles pour les lycéens dès le début du lycée en fonction du choix des spécialités.
Défendre le droit des bacheliers à s’inscrire dans la filière et l’université de leur choix implique que la direction de notre fédération et celles de ses syndicats concernés combattent pour l’abrogation de ces contre-réformes et de l’arrêté licence. Mais aussi, qu’elles appellent au boycott des organismes chargés de les mettre en œuvre.
Les attaques les plus graves sont brandies par le gouvernement avec en particulier en ce qui nous concerne, la remise en cause du statut de la fonction publique et la réforme des retraites qui signifierait la liquidation du code des pensions.
Le gouvernement a multiplié les chantiers et autres réunions de concertation et jusqu’à présent, il a bénéficié de la scandaleuse assiduité des représentants syndicaux censés défendre nos acquis historiques.
Alors que nous allons solliciter le vote de nos collègues aux élections professionnelles, quelle est la responsabilité de notre fédération ?
D’abord caractériser clairement les projets gouvernementaux contre la fonction publique et les retraites pour ce qu’ils sont : une déclaration de guerre contre les fonctionnaires.
Cela implique d’exiger le retrait immédiat des projets gouvernementaux et de se prononcer pour la défense inconditionnelle du statut de la fonction publique et du code des pensions.
Et évidemment, il ne saurait y avoir de concertation sur des projets destructeurs dont on exige le retrait pur et simple.
Pour obtenir gain de cause, notre fédération doit s’adresser aux autres fédérations de fonctionnaires pour qu’elles adoptent une position identique et que se constitue un front uni pour engager le combat contre le gouvernement et le mettre en échec.
La politique du gouvernement va se concentrer prochainement dans ses projets de budget de l’Etat et de la Sécurité sociale. Ce sont 7 800 postes de fonctionnaires dans la seule FP d’Etat que le gouvernement veut supprimer dont 1 800 dans l’Education nationale.
La direction de notre fédération doit s’adresser aux confédérations et fédérations syndicales pour la réalisation d’un front uni pour empêcher le vote de ces budgets.
Ne serait-il pas nécessaire dans cette perspective de convoquer une manifestation centrale devant l’Assemblée nationale au moment de la discussion de ces projets de budget ?
Intervention en défense du statut de la fonction publique
(19 septembre, présentation de motion)
Après avoir cassé le Code du Travail, instauré la sélection à l'Université et liquidé le statut des cheminots, le gouvernement Macron-Philippe a montré cet été sa détermination à poursuivre son programme de démantèlement de l'ensemble des droits sociaux acquis.
L’offensive contre la fonction publique a déjà commencé, en particulier dans le domaine de l’Éducation nationale avec notamment la fusion annoncée des Académies, la mise des enseignants sous la tutelle de leur directeur avec le profilage des postes, la confirmation de sa volonté d'en finir avec le paritarisme.
Et déjà Blanquer annonce : la prime au mérite en REP, l’évaluation des établissements, la réforme de la formation des maîtres avec à la clef la suppression des fonctionnaires-stagiaires...
L'offensive contre le statut de la FP au cœur du Programme Action Publique 2022 trouve son prolongement dans les projets de contre-réforme des retraites et la liquidation programmée du code des pensions qui fait partie intégrante du statut de la FP.
Ce qui est en jeu avec PAP 2022 c'est la fin des garanties collectives et individuelles, c'est la fin du statut !
C’est une attaque historique qu’il veut porter au statut des fonctionnaires mais aussi aux organisations syndicales.
Et pour cela, le gouvernement a ouvert 4 chantiers. Ce qui signifie qu’une fois de plus, il compte sur la concertation, et donc sur la participation des directions syndicales pour faire avancer ses projets.
Si on prend l’exemple du chantier n°3, la feuille de route du gouvernement est parfaitement claire : il s'agit de dégager des marges de manœuvre pour faire baisser la masse salariale dans la FP et faire payer aux fonctionnaires une partie de la réduction des déficits budgétaires et du remboursement de la dette.
Pour la grande majorité des fonctionnaires c'est une perte de pouvoir d'achat qui est au programme.
C’est en soi, un motif de rupture avec le gouvernement ! Le rôle des syndicats n'est pas d'être associé à la détermination des moyens pour faire baisser le pouvoir d'achat des agents.
Ce gouvernement est déterminé. Il nous a déclaré la guerre.
Il faut l'arrêter ! Il faut le faire reculer ! Pour le faire reculer, il faut l'affronter ! Mais pour l'affronter, il faut cesser de discuter avec lui.
Comment indiquer à nos collègues que les choses sont graves, si les directions de nos organisations continuent de discuter de l’indiscutable ?
Au moment où nous allons mener campagne pour convaincre nos collègues de voter FSU aux élections professionnelles, le meilleur signe qu’on pourrait leur envoyer, c’est de montrer que nos organisations sont en ordre de bataille pour affronter le gouvernement et cesser de discuter avec lui.
Où sont les fameuses victoires de la concertation qui justifieraient que les directions syndicales continuent de discuter avec un gouvernement qui veut détruire des conquêtes sociales et des vies humaines ?
Où sont-elles ? Je ne parle pas de miettes obtenues pour faire avaler les pilules, ou de reculs tactiques.
Toutes les défaites de ces dernières années ont été accompagnées par la concertation.
Le gouvernement n'a que faire des propositions alternatives que porteraient les directions syndicales. Ce qu'il veut, c'est leur présence dans ces concertations pour pouvoir ensuite affirmer que la démocratie est respectée !
C'est sa couverture ! Mettons-le tout nu !
Motion : Pour la défense du statut de la Fonction publique, retrait du Programme Action Publique 2022
Le rapport « Cap 2022 » et les chantiers ouverts par le gouvernement contre la Fonction publique témoignent de sa volonté de liquider le statut de la fonction publique dans toutes ses dimensions.
Il veut :
- liquider de fait les Commissions Paritaires ;
- accroître le pouvoir des supérieurs hiérarchiques sur les promotions ;
- instaurer le salaire au « mérite » ;
- substituer les recrutements sous contrat à ceux sous statut.
- pousser les agents concernés par des réorganisations de services à quitter la fonction publique.
C’est donc une attaque historique que le gouvernement veut porter au statut des fonctionnaires mais aussi aux organisations syndicales.
Le CDFN de la FSU réuni les 18 et 19 septembre 2018 :
- exige le retrait immédiat du projet gouvernemental visant à la destruction du statut de la Fonction Publique (Programme Action Publique 2022).
- décide que la FSU cesse immédiatement toute participation aux concertations sur les chantiers de déclinaison de PAP 2022.
- s’adresse aux autres fédérations syndicales de fonctionnaires pour qu’elles reprennent ces positions à leur compte.
(13 pour ; 80 contre ; 0 abstention ; 41 refus de vote)
Intervention pour la défense du droit des bacheliers aux études supérieures
(19 septembre, présentation de motion)
Le gouvernement Macron-Philippe est en train d’infliger une défaite historique aux jeunes et à leur droit d’études.
Après l’instauration de la sélection au niveau du master sous Hollande, c’est la loi ORE qui remet en cause le baccalauréat comme porte d’entrée à l’université.
Avec Parcoursup, près de 50 000 jeunes restaient sans affectation au 5 septembre et 27 % avaient quitté la procédure, majoritairement des bacheliers technologiques et professionnels.
La réforme du lycée préparant le bac. 2021 entre en application. Une note de service publiée début septembre précise que les cartes de formation seront arrêtées par le recteur début janvier, que dans le cas d’un établissement isolé, l’enseignement de spécialité non présent est assuré par le CNED, que par le biais de convention entre établissements, des enseignements pourront être dispensés dans des lycées voisins. L’idée est de mettre les lycées en réseaux sur un bassin et d’instituer le nomadisme des lycéens. Quant aux professeurs, ils verront leurs conditions de travail fortement se dégrader par la suppression massive des postes. Les 1400 suppressions annoncées par Blanquer n’en sont qu’un avant-goût. [Blanquer a annoncé 1200 suppressions supplémentaires, soit 2400 au total, NDLR]
Enfin, cette note précise que la combinaison des enseignements de spécialité doit prendre en compte « la pertinence des poursuites d’études dans l’enseignement supérieur ». Le tri se fera donc sur la capacité à faire les bons choix de spécialité dès la classe de seconde. On sait par avance ceux qui seront les moins aptes à faire les "bons choix". Ainsi, l’instauration des spécialités va non seulement conduire à renforcer la différenciation entre lycées et entre territoires, mais aussi à instaurer une sélection bien en amont du baccalauréat.
C’est la même cohérence qui guide les deux arrêtés du 30 juillet réformant la licence et le cadre national des formations. Applicables à la rentrée 2019, leur objectif est la mise en place de licences « maison », la diminution du temps de formation et l’individualisation du parcours de l’étudiant. C’est la fin du cadre national des diplômes.
Toutes ces réformes s’articulent pour évincer des études supérieures des milliers de jeunes et déqualifier la valeur des diplômes. Pour arriver à ses fins, le gouvernement suit la méthode qui a montré son efficacité : concertation préparatoire à ces réformes puis concertation sur leur mise en œuvre.
Pour défendre le droit aux études supérieures, il faut que le CDFN exige l'abrogation de ces contre-réformes, se prononce pour le boycott des organismes chargés de mettre en œuvre ces contre-réformes et s’adresse aux directions des syndicats enseignants pour qu’elles reprennent à leur compte ces positions.
Motion : Pour la défense du droit aux études supérieures pour les bacheliers
Le gouvernement Macron-Philippe veut en finir avec le droit des bacheliers à s’inscrire dans la filière et dans l’université de son choix. Tel est le but de loi ORE et de la réforme du lycée et du bac.
Avec l’arrêté licence il veut en finir avec la notion même de diplôme national.
Conformément à son objectif, Parcoursup a empêché des dizaines de milliers de jeunes de poursuivre des études supérieures.
Le CDFN de la FSU réuni les 18 et 19 septembre 2018 exige l'abrogation de la loi ORE, de la réforme du lycée et du bac, et de l’arrêté licence.
Le CDFN se prononce pour le boycott des organismes chargés de mettre en œuvre ces contre-réformes.
Le CDFN s’adresse aux directions des syndicats enseignants pour qu’elles reprennent à leur compte ces positions.
(13 pour ; 77 contre ; 1 abstention ; 43 refus de vote)
Intervention en défense des régimes des Retraites et de la Sécurité sociale
(19 septembre, présentation de motion)
Avec son projet contre les retraites, le gouvernement veut l'individualisation totale des retraites, la suppression de fait de tout âge légal de départ à la retraite, la fin de tout montant garanti de la retraite qui dépendra de la valeur du point, valeur aléatoire.
Darmanin a également annoncé la liquidation totale de la Sécurité Sociale, conquête historique du prolétariat, financée par le salaire différé que constituent les cotisations sociales dans le cadre d'une « agence unique de recouvrement ». Ce serait l'achèvement de la fiscalisation de la Sécurité Sociale et donc la fusion du budget de la Sécurité Sociale et de celui de l’État.
L'attaque contre les retraites s'inscrit dans l'ensemble des attaques contre la Sécurité Sociale :
- suppression des cotisations maladie dites "ouvrières"
- "pérennisation" du CICE sous forme d'exonération de cotisations patronales à partir de 2019
- suppression des cotisations sociales sur la partie du salaire liée à l'"intéressement"
Il faut y ajouter les mesures antérieures (baisse des cotisations patronales dans le cadre du pacte de responsabilité, etc.)
Et le gouvernement vient d'annoncer deux mesures d'une portée historique à savoir que "l’État ne compensera plus une partie des nouveaux allégements de cotisations dès 2019", et mieux encore, que « l'excédent des administrations de la Sécurité Sociale sera écrêté au profit de l’État : 3 milliards en 2019, 14 milliards en 2020, 20 milliards en 2021 et plus de 27 milliards en 2022".
La responsabilité des directions syndicales serait d'appeler tous les travailleurs à une manifestation centrale à l'Assemblée Nationale pour interdire le vote du budget de la Sécurité Sociale.
Depuis avril la concertation contre les retraites se développe sans interruption entre Delevoye et toutes les directions syndicales. Le 10 octobre, une nouvelle étape doit être franchie avec la convocation d'une réunion dite de "synthèse". Comme si les projets du gouvernement n'étaient pas connus!
Notre position doit être :
- Aucune participation à la concertation du 10 octobre !
- Retrait pur et simple du projet gouvernemental !
- Défense du régime général et de tous les régimes particuliers, dont le code des pensions des fonctionnaires !
Motion : Pour la défense des régimes de retraites et de la Sécurité Sociale
Le gouvernement Macron-Philippe à travers sa contre-réforme des retraites cherche à la fois à détruire le régime général et les régimes spéciaux, et en particulier le code des pensions pour les fonctionnaires.
Les concertations pour mettre en place cette destruction ont été lancées depuis avril 2018. Le gouvernement n'a jamais caché ses objectifs. La prochaine étape de la concertation aura lieu le 10 octobre.
La responsabilité de la FSU est de :
- défendre inconditionnellement le Code des pensions des fonctionnaires
- défendre inconditionnellement la Sécurité Sociale et l'abondement de sa branche vieillesse par le salaire différé
Pour cela, le CDFN de la FSU décide de rompre les concertations avec le gouvernement sur sa contre-réforme des retraites dont il exige le retrait pur et simple.
Le CDFN s'adresse aux autres organisations syndicales pour qu'elles en fassent de même.
(7 pour ; 77 contre ; 1 abstention ; 49 refus de vote)