Lettre de liaison N° 250 - 26 mai 2015 [Version pdf]
Abrogation du décret instaurant la contre-réforme du collège !
Pour obtenir l'abrogation, le gouvernement doit être affronté et défait. La responsabilité des organisations syndicales (notamment SNES, SNEP, ainsi que FO et CGT) : appeler dans l'unité toute la profession à une manifestation centrale au ministère !
Hollande et Valls ont choisi l'épreuve de force pour tenter d'infliger une défaite décisive au corps enseignant.
Alors que des dizaines de milliers de professeurs de collèges étaient en grève le 19 mai pour le retrait de la réforme du collège, c'est par provocation que le gouvernement a publié son décret ce jour-là, avec parution au journal officiel le lendemain. Il a clairement choisi la voie de l'affrontement avec les enseignants et leurs syndicats. Il a non moins clairement balayé toutes les illusions véhiculées par les directions syndicales depuis des années sur les vertus du “dialogue social”. En indiquant que celui-ci “avait eu lieu”, arguant du vote favorable du Conseil Supérieur de l'Education, la ministre a indiqué que le “dialogue social” ne pouvait avoir qu'une fonction : associer les directions syndicales aux contre-réformes réactionnaires. Il n'y a donc qu'une alternative : ou bien le gouvernement remporte la victoire, ou bien pour la première fois, il sera défait, et le décret abrogé.
Les organisations syndicales se sont prononcées pour l'abrogation du décret, et déclarent refuser de discuter des modalités d'application.
Il faut le noter : pour la première fois depuis des années marquées par de nombreuses attaques (décret “rythmes scolaires”, liquidation des décrets de 1950 …), confrontées à cette violente attaque, les organisations syndicales (FSU et SNES, FO, CGT notamment) se sont prononcées pour l'abrogation du décret (à l'exception des officines pro-gouvernementales UNSA et CFDT). Elles déclarent même refuser de discuter des circulaires d'application :
“Elles demandent l’abrogation de ces textes, décret et arrêté, et la reprise immédiate des discussions sur l’avenir du collège. En tout état de cause, elles refusent de discuter des modalités d’application de cette réforme.” (Communiqué SNES, SNEP, SNETAA, SNALC, FO, CGT, SUD-Solidaires)
Même si la demande de ”reprise immédiate des discussions sur l'avenir du collège” doit inviter les collègues à la plus extrême vigilance sur le fait qu'aucune discussion ne doit avoir lieu dans le cadre du décret, le communiqué affirme à cette étape que la discussion ne peut avoir lieu sur la mise en œuvre de la réforme.
En ce sens, c'est un point d'appui pour les enseignants. La question est donc maintenant : comment obtenir une telle abrogation ?
Le dispositif d'“action” prévu par les directions syndicales, non seulement ne permet pas de vaincre, mais ne peut aboutir qu'à dilapider la force qui a commencé à se manifester dans la grève du 19 mai.
Répétons-le : le gouvernement lui-même ne laisse d'autre choix que celui de l'affrontement. Est-ce que le dispositif d'action des directions syndicales permet d'organiser cet affrontement ?
“Elles appellent les personnels à signer et faire signer la pétition intersyndicale, à poursuivre les mobilisations en cours : assemblées générales, délégations, rassemblements etc., et à mettre en débat une journée de grève nationale en juin.
Elles appellent d’ores et déjà à faire du jeudi 4 juin une nouvelle journée nationale de mobilisation dans tous les collèges : heures d’information syndicale, rencontres et débats avec les parents.”
Actions locales en tout genre, “mise en débat” d'une journée de grève ; “journée nationale de mobilisation”, collège par collège ; pétition … Il faut ajouter l'appel bidon du SNALC au boycott du brevet qui n'aura pas lieu et sert surtout à justifier qu'aucun combat n'est mené d'ici là....Y a-t-il dans un tel dispositif de quoi faire céder le gouvernement qui a répondu à la grève largement suivie du 19 mai... par la publication du décret ? Pas un enseignant ne peut y croire une seule seconde !
Le piège grossier dans lequel on veut enfermer les enseignants.
A tous ceux qui opposent à ce dispositif des directions syndicales, la perspective d'un véritable affrontement avec le gouvernement, on sert aujourd'hui à nouveau la vieille ritournelle : “Il ne faut pas faire le jeu de la “droite”. Une formidable mise en scène est organisée, à grand renfort médiatique, visant à faire croire que la “droite” – c'est à dire l'UMP, l'UDI, Bayrou, les partis de la bourgeoisie – serait opposée à la réforme. Bayrou propose même une... “manifestation nationale” … peut-être parce qu'il se souvient de la gigantesque manifestation nationale qui l'avait contraint, lorsqu'il était ministre en 1994, de remballer son amendement à la loi Falloux en faveur de l'enseignement privé! Tout cela vise au fond à suggérer qu'être contre la réforme... ce serait “être de droite”.
Rappelons le plein et entier soutien du MEDEF à la réforme. Et rappelons aussi ce qui est le cœur de la réforme. Le centre de la réforme, ce n’est ni le latin (bien que sa suppression soit évidemment réactionnaire), ni les classes bilangues. Le centre, c’est l’autonomie des établissements. Or le premier pas vers l’autonomie, ce fut ... la réforme Bayrou (avec les horaires “fourchette”). Lemaire a rappelé la position de l'UMP lors du “débat” récent avec Vallaud-Belkacem : autonomie jusqu’au bout et recrutement des profs par les chefs d’établissement. Aujourd’hui, Apparu, bras droit de Juppé déclare : “La réforme propose 20% d’autonomie ; nous proposons 100% !”. La vérité, c'est donc que UMP, UDI, Bayrou opposent à la réforme Vallaud-Belkacem... une réforme Vallaud-Belkacem puissance 10 !
Voilà pourquoi les enseignants rejetteront avec mépris toute tentative de paralyser leur volonté de combat au prétexte des manœuvres de l'UMP/UDI/Bayrou qui constituent pour le gouvernement une véritable aubaine.
Les dirigeants syndicaux doivent appeler à la manifestation centrale de toute la profession au ministère pour l'abrogation du décret.
Si l'objectif est véritablement de vaincre, on ne peut le faire par la kyrielle des actions et rassemblements locaux. On ne peut le faire par la simple réédition d'une nouvelle grève de 24 heures. Face à l'offensive centralisée du gouvernement, il faut rassembler toute la profession contre lui, au niveau central. La responsabilité des directions syndicales est donc
d'appeler à la manifestation centrale au ministère pour l'abrogation du décret.
Un tel appel doit intervenir dans un délai rapproché, le seul délai acceptable étant celui d'une préparation sérieuse. Un tel appel doit s'accompagner d'un mot d’ordre de grève pour permettre effectivement à tout enseignant d'être dans la manifestation.
Voilà la perspective que le courant Front Unique propose aux enseignants, dans leurs assemblées générales, de faire valoir auprès des dirigeants syndicaux, dans les jours qui viennent.