Lettre de liaison N° 220 - 5 novembre 2013 [Version pdf]
Intervention du représentant du courant Front Unique au BDFN de la FSU du 4 novembre
La première chose qu’il revient de faire à ce BDFN de rentrée, c’est de saluer la jeunesse qui combat, celle qui s’est mobilisée spontanément avant les vacances contre l’expulsion de ses camarades. Sans cette mobilisation, aujourd’hui, la chasse aux immigrés menée par le gouvernement jusqu’au sein des établissements scolaires ne serait pas même remise en cause.
Ils réclament le retour des jeunes expulsés et de leurs familles. Aucun obstacle ne doit être opposé à ce que le front unique se réalise aujourd’hui sur cette exigence : avec les syndicats enseignants, mais aussi avec les organisations ouvrières, CGT et FO.
Les enseignants sont concernés au premier chef par ces expulsions. La question qui se pose, concrètement, dans les établissements, c’est : que ferons-nous si demain, nous sommes confrontés à la même situation que l’enseignante de Leonarda Dibrani ? Est-il encore permis d’enseigner à tous les jeunes, sans distinction, sans avoir un agent de police dans le dos ? Les collègues aspirent à résister.
La « réponse » de Hollande aux lycéens – proposer à une lycéenne de rentrer sans ses parents ! – ne se résume pas à un mélange d’abjection et de stupidité. Hollande a affirmé que les expulsions de jeunes étaient « légales » : mais précisément ! Le fait est que les lois racistes, les lois héritées de Sarkozy, sont pourries. Le fait est que, parmi les aspirations exprimées par les travailleurs et la jeunesse en chassant Sarkozy et en portant au pouvoir une majorité PS-PCF, il y avait la volonté que ces lois racistes soient abrogées, ouvrant la voie à la régularisation de tous les « sans papiers ».
En s’exprimant ainsi, Hollande a montré que derrière Valls, il y avait tout le gouvernement. Et si actuellement, les instituts de sondage et les médias s’autorisent à conforter la propagande xénophobe, si à Montauban le maire UMP interdit l’accès à la cantine ou aux transports scolaires pour les enfants d’immigrés, si le FN a le vent en poupe, c’est parce que tous sont confortés par la politique du gouvernement ! On parle souvent de « combattre les idées du FN » dans la FSU : à l’évidence, combattre le FN et tout ce qu’il représente, cela commence par combattre le gouvernement et sa politique.
Si Valls a jugé possible d’accentuer encore sa politique de chasse aux immigrés en la menant jusqu’au sein des établissements d’enseignement public, c’est parce qu’il s’appuie sur une circulaire négociée fin 2011 avec les dirigeants syndicaux. Ces mêmes dirigeants, parmi lesquels les dirigeants de la FSU, y saluaient à l’époque de prétendues « avancées » : pourtant la circulaire Valls a allongé le temps de scolarisation nécessaire à la régularisation des jeunes. Sans elle, ni Leonarda ni Khatchik n’auraient été expulsés !
Alors, il n’y a rien à attendre de la négociation d’une « nouvelle loi » telle que la réclament aujourd’hui les dirigeants syndicaux : la responsabilité de la FSU et de ses syndicats, c’est au contraire de réaffirmer son « mandat » pour l’abrogation des lois racistes et la régularisation de tous les « sans-papiers ».
Deux autres points suscitent actuellement une forte opposition des enseignants :
- La contre-réforme dite des « rythmes scolaires » : la préparation de nombreuses grèves dans le premier degré, les 13 et 14 novembre, montrent une fois de plus que le rejet de cette contre-réforme par les collègues ne se limite pas à Paris ou à Aubervilliers ! Et les collègues ont raison : la mise en place des « rythmes scolaires », c’est la destruction du cadre national de l’enseignement public et des statuts. Mais il faut le constater : dans cette affaire, a contrario de la volonté croissante des enseignants, la direction du SNUipp s’oppose de manière acharnée à l’exigence d’arrêt immédiat de la contre-réforme. Elle constitue aujourd’hui l’obstacle principal au combat des enseignants : ils devront, dans leur mobilisation, imposer à leur syndicat majoritaire de se soumettre à leur exigence.
- La demi-journée du 13 novembre : c’est une nouvelle demi-journée de corvée, lors de laquelle les enseignants sont mis à la disposition de leurs autorités locales, d’autant plus odieuse aux enseignants qu’elle est présentée comme le « rattrapage » d’une journée déjà travaillée ! Ce qui est en cause, ce sont les décrets de 1950 instituant les statuts, et tout particulièrement la définition des services en termes d’heures de cours. La responsabilité de la FSU et de ses syndicats enseignants est claire : ils doivent signifier au ministre qu’il n’est pas question de transiger avec les statuts, appeler les collègues à boycotter partout cette demi-journée.