LETTRE DE LIAISON


des militants combattant
pour le FRONT UNIQUE
des syndicats de l'enseignement public


 

Lettre de liaison N° 215 - 9 juillet 2013       [Version pdf]

Lors du congrès national du Snuipp, la direction nationale a été plébiscitée,

malgré son soutien constant au gouvernement Hollande-Ayrault-Duflot-Pinel.

Après la défaite sur les « rythmes », les enseignants des écoles, pour défendre leur statut et leurs retraites, auront à imposer le front uni de leurs syndicats contre le gouvernement.

L’enjeu majeur du congrès : la contre-réforme « rythmes scolaires »

Le congrès national du Snuipp s’est tenu du 11 au 14 juin 2013 à St Malo à la fin d’une année fortement marquée par l’attaque majeure contre l’école publique que représente le décret « rythmes scolaires ». Les enseignants des écoles ne se sont pas laissé abuser par les discours de Peillon sur l’intérêt des enfants. Ils ont compris que la réalité de ce décret, c’est une remise en cause du caractère national de l’enseignement public dans le 1er degré avec le renforcement du pouvoir des maires sur les écoles et leurs enseignants. Ils ont perçu que leur statut était menacé et que leurs conditions d’exercice allaient être dégradées. Ils se sont donc très largement mobilisés et ont même réussi, sur la ville de Paris, à forger le front uni de tous leurs syndicats permettant une mobilisation exceptionnelle. Mais les directions nationales des deux principaux syndicats (Snuipp-Fsu et Se-Unsa) ont refusé de prendre en charge leurs revendications et d’organiser l’affrontement avec le gouvernement. La direction nationale du Se-Unsa, malgré les résistances de certaines de ses sections départementales, a soutenu ouvertement la contre-réforme de bout en bout. La direction du Snuipp, confrontée à de nombreuses sections départementales sensibles à la mobilisation des enseignants, a d’abord tenté de dissimuler son soutien au gouvernement derrière des formules ambiguës. Contrainte de voter contre le projet de décret au Conseil supérieur de l’enseignement et même d’appeler à la grève le 12 février, c’était pour mieux saper et saboter la mobilisation des enseignants en refusant d’appeler à l’abrogation du décret et en revendiquant une  « réforme réussie » et l’application du décret dès la rentrée 2013 partout où c’était possible. Et désormais, le secrétaire général Sébastien Sihr siège dans le comité national de suivi qui « a pour mission d’accompagner et d’assurer le suivi de l’application de la réforme ». Même si en définitive, seules 20% des communes ont prévu d’appliquer la contre-réforme dès la rentrée 2013, ce sont au final tous les enseignants qui auront à subir l’application du décret.

Le congrès du Snuipp pouvait condamner cette trahison en prenant la responsabilité de répondre aux attentes des enseignants en revendiquant l’abrogation du décret.

Le délégué du courant Front unique, Denis Dutheil, a analysé les circonstances dans lesquelles se tenait le congrès et insisté sur ses responsabilités. (Page 3)

Mais dès l’ouverture du congrès, Sébastien Sihr, sur cette question des « rythmes scolaires », a réaffirmé le plein soutien de la direction nationale sortante au gouvernement. Il lui a d’abord prodigué des conseils : « Faire avancer l'école et mobiliser tous les acteurs exige de la pédagogie, de la constance et de la concertation ». Puis il a indiqué en filigrane le rôle assumé par la direction nationale contre la mobilisation des enseignants : « Cette séquence a été délicate pour tout le monde. Les coups de sang de certains de nos collègues, les inquiétudes et les interrogations d'autres, mais aussi les coups bas, les informations mensongères… il a fallu faire face. Et pourtant, nous avons, toutes et tous, tenu la barre. Nous n'avons jamais tergiversé. »

Au cours du congrès, des amendements ont certes été présentés contre les positions de la direction nationale. Ainsi l’un d’entre eux revendiquant la suppression des actions pédagogiques complémentaires (APC) a recueilli 53 % des votes (35 % s’y opposant). Mais par une manœuvre de Ch. Navarro, le principal représentant du courant École émancipée (qui codirige le syndicat avec le courant Unité et action), cet amendement se voyait écarté, au mépris du vote du congrès. Un autre amendement qui condamnait les projets éducatifs territoriaux (PEdT) a recueilli un tiers du vote des délégués. Mais la motion présentée par la section de l’Hérault, la seule qui exigeait l’abrogation du décret « rythmes scolaires » et le boycott du comité de suivi, n’a recueilli que 13,5 % des voix des délégués.

Même si ce résultat n’est pas négligeable, le gouvernement pouvait être rassuré en ce domaine.

Le congrès du Snuipp entérine la défaite des enseignants et permet au gouvernement de pouvoir envisager des attaques décisives contre leurs statuts. Des mobilisations locales sont encore possibles face au chaos annoncé par l’application du décret « rythmes », mais une mobilisation centralisée sur cette question semble peu vraisemblable même si elle ne peut être totalement exclue.

La contre-réforme des retraites à venir, en lien avec la 2ème conférence « sociale »

Alors que le gouvernement s’apprêtait à mettre en route une nouvelle contre-réforme des retraites avec le soutien des dirigeants syndicaux à l’occasion de la tenue de la 2ème conférence « sociale », la motion de l’Hérault et de l’Allier qui demandait à la direction de la Fsu de refuser de participer à cette conférence n’a quant à elle obtenu que 7,36 % des voix des délégués.

Il est à noter que juste avant le vote et alors que le rapporteur ÉÉ avait déjà appelé à rejeter cette motion, S. Sihr qui n’était pas inscrit est intervenu à la tribune pour dire : « La conférence sociale n'est pas une conférence sur les retraites (sic !). La FSU y a gagné sa place ; ce n'était pas évident il y a un an. Le 1er ministre reconnaît que la FSU est un acteur incontournable. Cette conférence doit être la possibilité de porter nos revendications et de construire les 1ères convergences avec nos partenaires. » Là aussi, le gouvernement pouvait être rassuré : pas de danger pour lui de ce côté-là.

Soutien total des directions de la Fsu et de ses syndicats à la Loi d’orientation

La loi d’orientation vient d’être adoptée avec le vote notable des élus du Front de gauche (PCF). Les directions de la FSU et de ses syndicats nationaux concernés ont joué un rôle déterminant dans son adoption en pratiquant une concertation systématique avec le gouvernement. S. Sihr a déclaré que cette loi « constitue un point d'appui indéniable dont nous devons nous saisir pour obtenir de nouvelles transformations du fonctionnement de l'école et du métier d'enseignant. »

Un congrès verrouillé, une direction plébiscitée

Le plébiscite accordé à la direction nationale (98,5 %) vaut approbation à l’orientation de soutien au gouvernement. La défaite subie par les enseignants dans leur combat contre le gouvernement se voit ainsi entérinée. Les velléités de résistance d’une partie substantielle des délégués ont été étouffées par la solidarité sans faille entre les directions des deux tendances qui codirigent le syndicat. Les délégués de la tendance École émancipée aiment à se présenter comme plus radicaux que ceux de la tendance majoritaire (Unité & action). Mais cette « radicalité » s’est cantonnée pendant tout le congrès uniquement à des questions secondaires et, pour les questions essentielles, les dirigeants ÉÉ ont amené les délégués de leur courant à se rassembler autour de la direction sortante.

Il faut noter que le Snuipp a un fonctionnement très particulier. D’abord, le vote sur l’orientation syndicale n’est organisé que plusieurs mois après le congrès national. Et de plus, aucun rapport d’activité depuis le précédent congrès n’est soumis au vote. Et pendant le congrès, il y a une arme qui permet à la direction de se sortir d’une situation embarrassante. Quand un amendement qui lui déplaît est adopté, elle en appelle à la nécessaire « synthèse » qui permet d’évacuer ledit amendement même s'il est majoritaire. Ainsi un amendement (déjà évoqué dans la 1ère partie) revendiquant la suppression des activités pédagogiques complémentaires (APC, qui remplacent l’aide personnalisée dans le décret « rythmes scolaires ») a été adopté par 53% des délégués, 35% s’y opposant. C’est alors que le principal dirigeant de l’École émancipée est monté à la tribune pour demander qu’une « synthèse » soit trouvée « pour que la majorité ne s’impose pas à la minorité » (sic !). Ce qui a abouti à la remise en cause de la position adoptée majoritairement.

Pour conclure, la défaite des enseignants des écoles très largement mobilisés contre le décret « rythmes scolaires » a été aggravée par les décisions du congrès national du Snuipp, principal syndicat du 1er degré.

Dans des conditions certes difficiles, les enseignants des écoles n’auront d’autre choix que de combattre les nouvelles attaques que le gouvernement veut leur faire subir. Pour défendre leur statut, pour s’opposer à l’instauration du cycle CM1-CM2-6ème…, ils devront – comme l’ont fait leurs collègues de Paris contre le décret « rythmes » – imposer aux dirigeants syndicaux la constitution d’un front uni contre le gouvernement sur la base de leurs revendications.

C’est de la même manière, avec l’ensemble des travailleurs, qu’ils devront procéder pour interdire la nouvelle contre-réforme des retraites.

 

Intervention de Denis Dutheil dans le débat général

De nouvelles attaques contre nos retraites se préparent, dans un contexte où la crise du mode de production capitaliste continue de s'approfondir.

Tous les gouvernements au service de leur bourgeoisie multiplient les coups contre les travailleurs, les jeunes, les retraités, allant jusqu'à provoquer leur déchéance, comme en Grèce, en Espagne, au Portugal… 

Le gouvernement Hollande-Ayrault-Duflot-Pinel, lui aussi, est décidé à mettre les bouchées doubles pour faire payer cette crise aux travailleurs.

C'est un gouvernement réactionnaire, qui envoie des troupes au Mali, qui fait la chasse aux Roms, qui est allé jusqu'à gazer une manifestation d'enseignants…

Après la loi de flexibilité, le décret « rythmes », et à la veille de la nouvelle « réforme » des retraites comment peut-on stopper le flot d'attaques gouvernemental ?

C'est à notre congrès de répondre à cette question !

Mais d'abord, comment Peillon a-t-il pu aller au bout du décret sur les rythmes scolaires alors que la grande majorité des enseignants des écoles rejetait son projet ? Il faut en convenir : la direction de notre syndicat a refusé de porter le mot d'ordre de retrait qui était la principale revendication des enseignants. Et aujourd'hui, la direction de notre syndicat accompagne la mise en place de la réforme, comme le prouve la participation de notre secrétaire général au Comité national de suivi qui, selon les termes du ministère, "a pour mission d'accompagner et d'assurer le suivi de l'application de la réforme".

Et les premières conséquences : désorganisation du fonctionnement des écoles, aggravation des conditions de travail des collègues, soumission aux potentats locaux… et la liste n'est pas exhaustive.

Plus que jamais, la responsabilité de notre congrès est d'exiger l'abrogation du décret « rythmes scolaires » et de boycotter dès à présent le Comité national de suivi.

Déjà une autre attaque majeure est en préparation contre les statuts. En s’appuyant sur le rapport de la Cour des Comptes, Peillon appelle à l’ouverture de discussions sur la redéfinition des statuts et obligations de service. Là aussi, une seule conclusion : le refus de cette concertation sur la remise en cause de nos statuts.

Une nouvelle contre-réforme des retraites va être lancée.

Le gouvernement tient sa méthode.

1) Convoquer tous les "partenaires sociaux" dans une conférence dite « sociale ».

2) Large concertation sur les pistes gouvernementales.

3) Vote de la loi.

Les pistes sont celles du rapport Moreau : c'est l'allongement à 44 ans de la durée de cotisation et la pension des fonctionnaires calculée sur les 10 dernières années au lieu des 6 derniers mois.

Malgré ça, les dirigeants de la FSU, et ceux de la CGT et de FO ont proclamé qu'ils iraient à la conférence « sociale ».

Or le code des pensions et les acquis qui subsistent en matière de retraites, ça ne se discute pas, ça se défend de manière intransigeante.

La responsabilité de notre congrès est d'affirmer clairement : aucune discussion sur ces régressions. Et donc : refus de participer à la conférence dite "sociale" des 20 et 21 juin. Il faut s'adresser en ce sens à la direction de la FSU et aux confédérations syndicales ouvrières pour qu'elles adoptent la même position.

Une telle prise de position solennelle de notre congrès à une semaine de la conférence « sociale » serait un véritable électrochoc contre un scénario déjà ficelé. Ce serait le signe tangible donné aux travailleurs du pays de notre volonté de tout mettre en œuvre contre la nouvelle contre-réforme des retraites.

Motion « Rythmes scolaires » (présentée par l’Hérault)

A juste raison, la grande majorité de la profession s'est dressée contre le décret dit des rythmes scolaires promulgué le 24 janvier.

En supprimant la coupure hebdomadaire du mercredi, ce décret dégrade les conditions de travail des enseignants sans améliorer celles des élèves.

Mais surtout, avec les « projets éducatifs territoriaux » (PEDT), c’est le fonctionnement des écoles qui sera déterminé par les municipalités ouvrant la voie à une mise sous tutelle des enseignants.

En défense du caractère national de l’enseignement public et du statut des enseignants des écoles, le congrès national du Snuipp exige l’abrogation pure et simple du décret « rythmes scolaires ». Le Congrès appelle à la mobilisation unitaire des syndicats enseignants pour obtenir cette abrogation.

En conséquence, le Snuipp se retire, dès à présent, du comité national de suivi qui « a pour mission d’accompagner et d’assurer le suivi de l’application de la réforme ».

Pour : 49 (13,5%)       Contre : 276 (76%)     Abst. : 38 (10,5%)       RV : 8

Intervention de Yves Ankaoua, délégué de l’Hérault

Je présente la motion de l’Allier et de l’Hérault sur les retraites

Comme il y a 3 ans, notre congrès se tient alors que des régressions majeures sont programmées contre nos retraites.

Hollande a annoncé qu’il voulait imposer un allongement de la durée de cotisation. Le rapport Moreau évoque une durée de 44 ans, une remise en cause du calcul des pensions pour les fonctionnaires et la diminution des pensions des retraités.

Ayrault a annoncé un calendrier qui ressemble beaucoup à celui de 2010 : Conférence « sociale », concertation puis vote de la loi.

C’est le même planning que pour la loi de flexibilité dite ANI.

Ayrault déclare que « le dialogue social est la clé pour réussir les réformes ». Justement nos collègues ne veulent pas que le gouvernement réussisse. Ils veulent son échec.

Alors, le refus des directions syndicales de participer à la 2ème conférence « sociale » serait un message clair aux personnels pour leur indiquer la gravité de la contre-réforme à venir. Et cela signifierait que si le gouvernement persiste à s’en prendre à nos retraites, il trouvera un front sans faille pour les défendre.

Pour cela, notre congrès doit demander à la direction de la Fsu de refuser sa participation à la 2ème conférence « sociale » et de s’adresser aux directions des autres organisations syndicales pour qu’elles fassent de même.

Motion « réforme des retraites » (présentée par l’Allier et l’Hérault)

Ayrault a indiqué que la loi de flexibilité (transposition de l’accord Medef-Cfdt), est issue de la feuille de route de la 1ère conférence sociale. Il a déclaré aussi : « Un an après la première conférence sociale, la méthode a porté ses fruits, la méthode montre que c’est la bonne voie. »

C’est donc par le biais de la 2ème conférence sociale que le gouvernement entend mettre sur les rails sa contre-réforme des retraites dont Hollande a annoncé qu’elle aboutirait notamment à allonger la durée de cotisation (44 ans sont évoqués) pour bénéficier d’une retraite.

Le gouvernement compte s’appuyer aussi sur le rapport de commande que doit lui fournir la commission présidée par Mme Moreau. Celle-ci a prévenu la Fsu que dans son rapport, « il n’y aura que des mauvaises nouvelles ».

Pour empêcher les nouvelles régressions programmées par le gouvernement, le congrès national du Snuipp s’adresse à la direction nationale de la Fsu pour qu’elle refuse de participer à la conférence « sociale » et propose aux directions des autres organisations syndicales d’adopter la même position.

Pour : 27 (7,36 %)      Contre : 293 (79,8 %)                        Abst. : 47 (12,8 %)      RV : 7




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